Les allumettes suédoises Robert Sabatier
L'enfant passa le bout de ses doigts sur ses lèvres, effleura sa joue humide, glissa sur des yeux verts trop grands pour son visage, écarta une mèche de longs cheveux dorés qui retomba aussitôt sur son front. Il respira longuement, à petits coups, l'air chaud, poussiéreux.
Assis sur le bord du trottoir, à égale distance entre les deux raies délimitant le bloc de pierre, l'ourlet de sa culotte de velours noir imprimait un pli sur chaque cuisse. Il ne se leva pas tout de suite, observant attentivement tout ce qui l'entourait comme s'il venait de s'éveiller dans un lieu inconnu de lui. Pour la première fois, le spectacle le retenait, scène après scène, décor après décor: jusqu'ici, il n'avait fait que se blottir dans les bras de sa mère, à l'écart des choses de la rue, il ne les avait jamais vraiment vues, et voici qu'elles apparaissaient dans leur existence propre, le ramenant à son corps, à ses vêtements, à lui-même.
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