jeudi 29 décembre 2022

La carte postale A. Berest

Ma mère a allumé la première cigarette de la journée, sa préférée, celle qui brûle les poumons au réveil. Puis elle est sortie de chez elle, pour admirer la blancheur qui recouvrait tout le quartier. Il était tombé dans la nuit au moins dix centimètres de neige. Elle est restée longtemps à fumer dehors, malgré le froid, pour profiter de l'atmosphère irréelle qui flottait sur son jardin. Elle a trouvé que c'était beau, tout ce rien, cet effecement de la couleur et des lignes. Soudain, elle a entendu un bruit étouffé par la neige. Le facteur venait de faire tomber le courrier par terre, au pied d ela boîte aux lettres. Ma mère est allée le ramasser, en faisant bien attention de regarder où elle posait ses chaussons pour ne pas glisser.

Un récit dans lequel elle part à la recherche de l'origine de sa famille. Le ressort narratif de cette carte postale est absolument fantastique à tous les sens du terme et, en même temps, assez effrayant dans ce que ça soulève de questions. C'est l'exploration d'une généalogie familiale mouvante avec cette famille de juifs errants qui va traverser toute l'Europe et qui, surtout, ne pourra jamais réellement s'installer, car toujours obligée de repartir très vite. Elle parle très bien des réactions des uns et des autres.  C'est un livre terrible sur la méticulosité effarante, effroyable, rationnelle de la solution finale et de sa mise en œuvre en France sur l'organisation des rafles, sur le zèle des autorités administratives et de la police française, sur la responsabilité de Vichy et de Pétain… "Elle redonne vraiment vie à ces quatre personnes en leur donnant une vraie épaisseur. Ces quatre noms n'étaient que des fantômes, qui venaient la hanter sans qu'elle sache vraiment pourquoi, puisque c'est une histoire qui ne s'est pas transmise. Rappelons que la principale témoin, la grand-mère, n'a rien dit, elle a gardé le silence.

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