lundi 31 décembre 2018

La dernière nuit du Raïs. Y. Khadra

"Quand j'étais enfant, il arrivait à mon oncle maternel de m'emmener dans le désert. Pour lui, plus qu'un retour aux sources, cette excursion était une ablution de l'esprit.
J'étais trop jeune pour comprendre ce qu'il cherchait à m'inculquer, mais j'adorais l'écouter.
Mon oncle était un poète sans gloire et sans prétention, un Bédouin pathétique d'humilité qui ne demandait qu'à dresser sa tente à l'ombre d'un rocher et tendre l'oreille au vent surfant sur le sable, aussi furtif qu'une ombre.
Il possédait un magnifique cheval bai brun, deux sloughis alertes, un vieux fusil avec lequel il chassait le mouflon, et savait mieux que personne piéger la gerboise, prisée pour ses vertus médicinales, ainsi que le fouette-queue, qu'il revendait au souk, empaillé et verni."
Mégalomane, narcissique, sanguinaire, barbare, bestial, affichant une absence totale de considération pour la vie d'autrui, mais par-dessus tout humain. Et cette humanité mise en avant est terrible et aggrave la culpabilité du monstre : la folie aurait été une excuse trop commode.
Kadhafi est tout sauf fou, il est au contraire très lucide sur ses actes, et j'ai trouvé que c'était l'une des forces du roman. Car n'oublions pas qu'il s'agit d'un roman, même si son réalisme est frappant. À partir d'actions avérées, Khadra  invente des pensées tout à fait plausibles.
Un récit fort et violent porté par une très belle écriture, comme toujours avec cet auteur. Une lecture marquante.

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