mardi 26 septembre 2023

Vie, vieillesse et mort d'une femme du peuple. D. Eribon

Je ne serai donc allé à Fismes que deux fois. A un moment où je pensais que cette commune de quelques milliers d'habitants située à 30 kilomètres au nord de Reims, allait devenir, au cours des mois et peut-être des années à venir, l'un des cadres de mon existence.

Je me disais que je visiterais un jour l'hôtel de ville qui, à peine édifié en 1912, avait été presque totalement détruit pendant la Première Guerre mondiale, puis reconstruit au milieu des années 1920, dans le même style Renaisswance tardive qu'auparavant. Que je marcherais, derrière ce bâtiment étrangemment solennel au centre d'un décor ni tout à fait villageois ni tout à fait urbain, sur la place du marché bordée de magasins divers et de maisons hautes, dont certaienes affichrnt fièrement des ornementations "Art déco", semblables à celles que l'on trouve dans le centre de Reims puisque édifiées à la même époque et dans les mêmes circonstances.

Après la mort de sa mère, Didier Eribon reprend le travail d’exploration personnelle et théorique qu’il avait entrepris dans Retour à Reims après la mort de son père. Il analyse le déclin de sa mère, ce qui l’amène à réfléchir sur la vieillesse et la maladie, sur nos rapports aux personnes âgées et à la mort, mais aussi sur l’expérience du vieillissement. Il s’interroge également sur les conditions de l’accueil des personnes dépendantes. Il montre que si l’expérience du vieillissement nous est très difficile à penser, c’est parce qu’il s’agit d’une expérience-limite dans la philosophie occidentale, dont l’ensemble des concepts semblent se fonder sur une exclusion de la vieillesse.
Eribon reparcourt également la vie de sa mère, et notamment les périodes où elle était femme de ménage, ouvrière puis retraitée, la saisissant dans toute sa complexité, de sa participation aux grèves à son racisme obsessionnel.
Il conclut sa démarche en faisant de la vieillesse le point d’appui d’une réflexion sur la politique : comment pourraient se mobiliser des personnes qui n’ont plus de mobilité ni de capacité à prendre la parole et donc à dire « nous » ? Les personnes âgées peuvent-elles parler si personne ne parle pour elles, pour faire entendre leur voix ?

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