lundi 2 mars 2020

Le front russe JC Lalumière

Enfant, je pouvais passer des heures à regarder le papier peint. les murs du séjour de la maison de mes parents, recouverts d'un motif végétal rococo postmoderne Vénilia- collection 1972, produisaient des monstres du meilleur effet sur mon esprit si facilement impressionnable; j'avia tout juste huit ans. Je m'installais sur le canapé de velours marron, fixais mon regard à mi-chemin entre le sofa et le mur et attendais  patiemment que les formes au-delà du point flottant dans l'espace sur lequel je me concentrais prissent peu à peu l'aspect de la face grimaçante d'une créature de l'enfer: les fleurs de lys fournissaient les oreilles et les cornes, les feuilles d'acanthe, une geule hurlante, langue pendante, deux tiges entrelacées de chevrefeuille ou de passiflore, filaient vers le haut et formaient au sommet une coiffure serpentine; au passage deux feuilles disposées de façon symétrique dans le motif dotaient ce monstre de petits yeux sournois et hypnotiques dans lesquels je finissais par ètre happé.
Après une enfance solitaire et rêveuse, le narrateur ne souhaite que voyager. Réussir le concours d'entrée au ministère des Affaires étrangères lui semble le premier pas vers ses ambitions diplomatiques et géographiques. Hélas, « ayant à tort confondu le Quai d'Orsay avec un quai d'embarquement » (p. 20), le narrateur est relégué au bureau des pays de création/section Europe de l'Est et Sibérie. La faute à un attaché-case encombrant et mal placé qui lui vaut cette douloureuse relégation sur ce que le ministère des Affaires étrangères appelle le « front russe ». Triste affectation pour ce fonctionnaire ambitieux nourri au magazine Géo…
Satirique.

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