Je porte dans mon prénoml'humanité naissante, mais j'appartiens à une humanité qui s'éteint, notera Adam dans son carnet deux jours avant le drame.
Jamais je n'ai su pourquoi mes parents m'ont appelé ainsi. Dans mon pays natal, ce prénom était rare, et personne dans ma famille ne l'avait porté avant moi. Je me souviens d'avoir posé un jour cette question à mon père, il m'avait simplement répondu: "C'est notre ancêtre à tous!", comme si je pouvais l'ignorer. J'avais dix ans, et je m'étais contenté de cette explication. J'aurais peut-être dû lui demander, tant qu'il était en vie, s'il y avait derrière ce choix une intention, un rêve.
Amin Maalouf évoque pour la première fois, même si elle n’est pas
directement nommée, la guerre du Liban. Elle est vécue différemment par
les anciens amis de jeunesse du « club des Byzantins ». Il y a ceux qui
sont partis et ceux qui sont restés. Certains ont émigré à l’étranger
comme Adam : Naïm, juif, est parti au Brésil, Albert a fui aux
Etats-Unis. Mourad et Tania sont restés au Liban, Mourad s’est « sali
les mains » dans la guerre et est devenu ministre. Bilal est mort aux
premiers jours d’un combat qu’il voulait engagement littéraire et
intellectuel. Les choix des uns et des autres ont provoqué des rancunes
et des incompréhensions au sein du groupe d’amis. La plupart reprochent
ainsi à Mourad son engagement dans le conflit, son renoncement à leurs
idéaux de jeunesse, sa participation à la machine de guerre. De son côté
Mourad et Tania reprochent à Adam son départ, sa trahison envers son
pays, son abandon, et la lâcheté de celui qui explique : « Nous avons du
nous éloigner du Levant pour garder les mains propres ».
les matins - Amin Maalouf por franceculture
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