dimanche 2 juin 2013

La jarre d'or R.Confiant



Il y avait beau temps que cette manière de légende galopait sur les lèvres tumefiées par le rhum, à travers bouches édentées et voix volontairement éraillées des conteurs créoles du temps de l’antan. De ceux qui, au beau mitan des veillées mortuaires, quand le poids de la nuit se faisait accablant et que chacun se retirait dans sa chacunière, avaient le don de défier l’au-delà ou de le dérisionner à grandes rafales de mots forcément obscurs. Et, soudain, jaillissait un morceau de parole claire, comme nous disions dans notre parlure vieillotte qui faisait tant et tellement sourire les étrangers venus d’En-France ou d’Amérique, créatures pleines de savantise harnachées de fils, de micros, de magnétophones et d’appareils photo qui enregistraient le moindre de nos propos et nous mitraillaient de leurs flashes. Ils tenaient, à ce qu’il semble, en très haute estime nos mœurs alors que nous autres, bien au contraire, nous nous efforcions année après année, de les dissimuler , voire même de les effacer.
Toujours un plaisir... de lire la langue martiniquaise.

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