samedi 6 février 2010

Chaleur du sang I.Nemirovsky

Nous buvions du punch léger, à la mode de ma jeunesse. Nous étions assis devant le feu, mes cousins Erard, les enfants et moi. C'était un soir d'automne, tout rouge au-dessus des champs labourés trempés de pluie; le couchant de flammes promettait un grand vent pour le lendemain; les corbeaux criaient. Dans cette grande maison glacée l'air souffle de partout avec le goût âpre et fruité qu'il a en cette saison. Ma cousine Helène et sa fille, Colette, grelottaient sous les châles que je leur avais prêtés, des cachemires de ma mère. Comme toutes les fois où elles viennent me voir, elles me demandaient comment je fais pour vivre dans ce trou à rats et Colette, qui est à la veille de se marier, me vantait les charmes de Moulin-Neuf où elle va habiter désormais, "où j'espère vous voir souvent, cousin Silvio", disait-elle. Elle me regardait avec pitié. je suis vieux, pauvre, je suis garçon; je me terre dans une masure de paysan au fond des bois. On sait que j'ai voyagé, que j'ai mangé mon héritage; fils prodigue, lorsque je suis revenu dans mon pays natal, le veau gras lui-même était mort de vieillesse, après m'avoir longtemps espéré en vain.

1 commentaire:

oLgA a dit…

gracias por pasar y dejar comentario.