Partir Tahar ben Jelloun
A Tanger, l'hiver, le café Hafa se transforme en un observatoire des rêves et de leurs conséquences. Les chats des terrasses, du cimetière et du principal four à pain du Marshan se réunissent là comme pour assister au spectacle qui se donne en silence et dont personne n'est dupe. Les longues pipes de kif circulent d'une table à l'autre, les verres de thé à la menthe refroidissent, cernés par des abeilles qui finissent par y tomber dans l'indifférence des consommateurs perdus depuis longtemps dans les limbes du hashich et d'une rêverie de pacotille. Au fond d'une des salles, deux hommes préparent minutieusement la potion qui ouvre les portes du voyage.